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Dialogue social ? Pourriez répéter s'il vous plaît ?

Publié le par leïla shahshahani

Samedi 23 octobre, le ministre Jean-Louis Borloo, invité du JT de 20h sur France 2, appelle les employés des raffineries à la reprise du travail et indique la nécessité de renouer le dialogue social. J'ai cru mal entendre : REnouer ? Ou nouer tout court, peut-être ? Au gouvernement, on a pas peur d'inverser les rôles : depuis le mois de juin dernier, des millions de manifestants et toutes les organisations syndicales demandent la tenue de négociations avec tous les partenaires concernés pour décider de l'avenir des retraites. L'appel solennel de monsieur le ministre sur le plateau de France 2 n'a pas eu l'air de perturber la journaliste Marie Drucker, qui s'est contenté de hocher la tête.

Combien de fois les manifestants sont-ils descendus dans la rue pour s'entendre dire, sur le ton du plus grand mépris, comme on parle à des enfants en plein caprice : "Non, non et non !". Chaque fois, des employés ont posé des jours de grève, perdant une partie importante de leur salaire, pour s'entendre dire de rentrer sagement chez eux. L'entêtement et le mépris de l'équipe gouvernementale a fini par excéder la foule, les jeunes notamment, accusés d'être "manipulés", n'ayant certainement pas de cerveau pour penser. On s'étonne que le mouvement se soit durci ? Nul besoin d'une boule de cristal pour le prédire. On l'aurait souhaité qu'on n'y serait pas pris différemment.

Désormais, le gouvernement joue sa carte habituelle de la division : Français, si vous ne pouvez pas partir en vacances à la Toussaint, c'est à cause des employés des raffineries, c'est à cause des cheminots. Si vous ne pouvez pas sortir de chez vous sans vous pincer le nez, c'est à cause des éboueurs. C'est énorme, mais on peut craindre que la stratégie fonctionne. Les opposants à cette réforme ne devraient-ils pas plutôt remercier les travailleurs qui ont le pouvoir de paralyser un tant soit peu le pays, de bien vouloir le faire aussi en leurs noms et sur leurs propres jours de paie ?

Le mouvement de constestation actuel, qui rassemble des mécontentements allant bien au-delà de la question des retraites (discriminations racistes, stigmatisation des Roms, affaires politico-financières...), doit-il s'arrêter lorsque la loi sur les reraites sera votée par le Sénat ? "Le légal n’est pas le juste, et l’espace démocratique apparaît aussi comme un lieu de mise en cause des lois instituées codifiant l’injustice, la désobéissance aux injonctions légales constituant une des formes de résistance à l’injustice dont disposent les citoyens", écrit Philippe Corcuff dans son texte "Retraites pour une guérilla sociale durable et pacifique".

Et puis au fait, il n'y a pas que la retraite dans la vie, et il n'y a pas non plus que le travail. Il y a avant tout, pour beaucoup, l'envie de vivre dans une société certes plus juste et plus solidaire, mais aussi dans une société où l'épanouissement des personnes l'emporte sur l'abrutissement par le travail au nom d'une croissance matérielle à tout prix, de toute façon intenable pour la planète. Le 7 septembre dernier, le journaliste du Monde Hervé Kempf, auteur de "Comment les riches détruisent la planète" et "Pour sauver la planète, sortez du capitalisme", écrivait : "Si la récupération du butin amassé par les capitalistes est un préalable, elle ne saurait suffire à résoudre les problèmes : dans un monde où la crise écologique s’affirme toujours plus, la poursuite de l’enrichissement matériel collectif doit être contestée. Le renouveau de la solidarité collective doit être prolongé par une nouvelle conception de l’économie" (voir l'article complet).


A propos des retraites, à lire sur Investig'action  :

"Dix raisons de dire non" (source : Jean-Marie Harribey pour Politis) et "Les retraites expliquées à ma grand-mère" (source : www.resistance-politique.fr).

D'autres liens vers des documenst intéressants sur "Un avant-goût de manif"

 

 

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